Poèmes de Kourman agg-elselisu
traduit du tamacheq au français par:
Moussa Albarka et dominique Casajus.
Tandis qu’ils dorment tous, je dis mon chant d’amour.
Des pensées en grand nombre à l’envi me poursuivent,
Soufflées par le démon ténébreux dont tourmentent
Mon âme à l’agonie les murmures fétides ;
Je le vois qui frémit, s’avançant devant moi.
Il est aussi cruel qu’une hyène à collier
Ou que le sanglier se vautrant dans la fange,
La hure hérissée et dardant ses défenses,
Lorsqu’il me dit tout bas : « Je sais pour cette nuit
Quels tendres entretiens nous donnerait l’amie
Dont la bouche mignonne [en s’entrouvrant découvre,]
Des dents que leur blancheur rend pour toi plus précieuses
Que les brins ajourés d’un tissu de coton. »
J’enlace [dans mon rêve] un cou que lui envie
La gazelle paissant sur les terres herbeuses.
Huilés et torsadés, ses cheveux sont pareils
À la corde tressée dans la laine des chèvres.
Sa peau luit comme un champ sur la haute colline,
Quand les nuées gonflées déversent à l’aplomb,
Au milieu des éclairs, une pluie ruisselante,
Dont s’abreuve et se lave une steppe assoiffée.
Ah ! j’aime son visage, entre joues et sourcils.
Ah ! elle m’a frappé d’un dard empoisonné,
Me laissant à mon mal et aux plaies qui me rongent.
Est-ce un aigle qui plane au-dessus de ma tête
Escorté de corbeaux croassants et avides ?
Attendant la curée, les voici qui se posent.
Comme un fauve affamé, l’aigle d’abord s’avance ;
Dans mon sang il se baigne et son bec est dressé,
De ses serres il ouvre une plaie douloureuse
Tandis qu’entre mes flancs mes entrailles s’épanchent.
Comme si ce démon avait entendu l’aigle
Il le frappe soudain d’une épée à sa taille.
La vision se dissipe en un froissement d’ailes.
J’approche mon chameau et je saisis sa selle,
Puis en serre la sangle adaptée à son flanc,
Prêt à le cravacher d’un rameau de gommier.
In (Moussa Albaka, Dominique Casajus. Trois poèmes touaregs de la région d’Agadez. Awal (Cahiers
d’études berbères), Éd. de la Maison des sciences de l’homme, 1988, pp.145-163. halshs-01070999)
d’études berbères), Éd. de la Maison des sciences de l’homme, 1988, pp.145-163. halshs-01070999)
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